Et si l'amour semait les graines de notre libération collective ?
Ma lettre d'amour à tout ce / toustes celleux que tu es
Je réclame la fin de ce monde as I love you and I want genocide to stop1.
Parce que je te vois.
Je vois corps déchiqueté d’une petite fille derrière les publicités du Superbowl, le sang des mineur-e-s congolaises dans les garages des ecolos des classes moyennes et bourgeoises, les mains des ouïgour-e-s agrippant le col des tee-shirts blancs, les yeux des enfants qui ne voient plus que saleté dans leurs gorges parce que leurs pères, leurs oncles, des intellectuel-le-s et des génies y ont enfoncé leur sexe pour les initier à l’amour.
Je te vois et je t’aime.
Je t’aime as I move for our collective liberation.
J’ai réfléchi, tu sais. J’ai ressenti, j’ai pleuré, j’ai crié jusque la rage irrite ma gorge.
Je suis convaincue à présent que le système de domination articulant toutes les oppressions se fon-de, tient sur la présomption de non-humanité et moins qu’humanité des dominé-e-s. Que ce système se fon-de, tient sur le droit inaliénable à l’humanité pour les dominant-e-s. Que l’humanité y est conçue comme une propriété privée, un héritage de naissance et que bien qu’elle nous soit constamment promise, nous ne pourrons jamais y accéder.
Jamais tout à fait. Jamais toustes.
Que peu importe nos actions, nous nous retrouverons derrière le grillage, du côté du mal, de l’infériorité morale pour qu’iels puissent justifier leurs violences et le déploiement de leur nécropolitique. Et que peu importe les leurs, iels se retrouveront au-delà du grillage, du côté du bien, de la supériorité morale.
Je t’aime. Je refuse que tu portes la charge de prouver ton humanité. Je t’aime et j’entends l’humanité comme un verbe, un mouvement, des actes, un souffle, des cosmopoétiques, parcourant tous les êtres, au sein desquels, au regard de ce qu’iels font et de ce qu’iels ont fait, c’est bien aux dominant-e-s de prouver leur humanité, pas à toi.
Je refuse que ton droit à la vie et au respect de ton intégrité soit conditionné par le fait que tu soies une victime parfaite. Qu’iels puissent se conforter dans le fait qu’Adama, Naël avaient fait ceci, cela donc leurs morts étaient justifiées. Qu’une seule perfection morale nous permettrait d’accéder au droit de ne pas se faire tuer en pleine rue. Je t’aime. Ton droit à la vie et au respect de ton intégrité se situe bien avant, bien avant cela. Je t’aime et je veux pouvoir te voir. Dans tout ce que tu es. Adresser, avec toi, les violences et les blessures dont nous avons héritées quand la peau et la violence des dominant-e-s s’est mêlée à la nôtre.
Tu sais, James Baldwin disait :
« People who shut their eyes to reality simply invite their own destruction, and anyone who insists on remaining on a stage of innocence long after that innocence is dead turns himself into a monster ».
Je crois c’est de ce passage que nos communautés et le milieu manquent…
De ce passage et d’amour.
Nous sommes néxs dans ce système de domination, ici, dans les anciennes colonies. Nous ne sommes plus innocent-e-s. Peut-être même ne l’avons nous jamais été. Mais c’est ici aussi que commence l’amour, un amour hors du ventre du système de domination. Long after our innocence is dead, je t’aime.
Hands off Rafah, hands off Congo, hands off Sudan, hands off Senegal, Hands off Haiti, hands of children, hands of gender minorities, hands off POC, hands off all the less than human and non-human beings.
Je t’aime as we will get our collective liberation.
écho à l’Intifada Incantation: poem 8 for b.b.L. de June Jordan.
Merci pour ce si beau texte 🖤